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Les voyages spatiaux ont des effets étranges sur le cerveau

Des neuroscientifiques ont mesuré l'influence de la microgravité sur le cerveau en auscultant des cosmonautes avant et après leur séjour sur l'ISS.
Image:​ Martin420
Image: Martin420

Les vols spatiaux sont excitants, inspirants et fédérateurs — mais aussi, et malheureusement, une rude épreuve pour le corps humain. Une nouvelle étude indique que les missions spatiales de longue durée affectent le cerveau humain. Tout en réduisant la matière grise, elles font augmenter le volume du liquide céphalo-rachidien.

Dans un rapport publié le 24 octobre dernier dans The New England Journal of Medicine, une équipe dirigée par Floris Wuyts, neuroscientifique à l’université d’Anvers, détaille les résultats d'examens cérébraux effectués sur dix cosmonautes russes.

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Les cosmonautes ont été soumis à des IRM (Imagerie par Résonance Magnétique) juste avant leur départ pour l’International Space Station et environ neuf jours après leur retour sur Terre. Sept des dix cosmonautes ont également été examinés 200 jours après leurs vols pour comprendre comment leurs cerveaux s’étaient remis de l'expérience après un certain délai. Ces cobayes étaient tous des hommes âgés de 44 ans en moyenne. Leur durée de séjour moyenne sur l'ISS était de 189 jours.

Wuyts et son équipe ont constaté que la matière grise — un tissu cérébral important pour le traitement de l'information — avait perdu jusqu’à 3.3% de volume pendant les vols des cosmonautes. Une partie de cette matière grise a été récupérée au cours des 200 jours suivant le retour. Cependant, les volumes restaient inférieurs aux niveaux pré-vols.

En revanche, le volume de liquide céphalo-rachidien, le liquide dans lequel baigne le cerveau, avait augmenté pendant le vol spatial. L’étude se concentrant spécifiquement sur l’évaluation des volumes de tissu cérébral, on ne sait pas si ces changements physiologiques ont une influence sur la capacité cognitive ou le comportement des cosmonautes.

Angelique Van Ombergen, chercheuse postdoctorale à l'université d’Anvers, explique qu’il est encore difficile d'expliquer pourquoi la microgravité entraîne ces variations. L’hypothèse principale, c'est que la microgravité provoque le déplacement de fluides vers le torse et la tête car la gravité n’exerce pas sa fonction de pesanteur. « Nous pensons que tous les changements constatés ici sont dus à ce déplacement du liquide » écrit-t-elle dans un mail à Motherboard.

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Des observations post-vol sur la matière blanche, un tissu cérébral recouvert de myéline, un liquide qui augmente la vitesse des impulsions des fibres nerveuses, pourrait aider les chercheurs à boucler l'énigme. Initialement, le vol spatial ne semblait pas du tout affecter le volume de matière blanche. Mais lorsque l’équipe a examiné les cosmonautes plusieurs mois plus tard, leur volume de matière blanche avait diminué. Les chercheurs pensent que les changements à long terme dans la circulation du liquide céphalo-rachidien pourraient en être la cause. Davantage d'examens sont nécessaires pour le confirmer.

« L’IRM permet d’explorer plusieurs aspects du cerveau » indique Van Ombergen. « L’étude actuelle s’intéresse uniquement à l'un de ces aspects (le volume des tissus), mais nous pourrions étudier la matière blanche et les connexions cérébrales de manière plus approfondie. »

Les chercheurs cherchent de nouveaux cosmonautes pour des études plus complètes sur l’influence des missions spatiales longues sur la fonction cérébrale. Bien que cette expérience n’ait pas remarqué d’effets négatifs sur la capacité cognitive, Van Ombergen estime que les travaux à venir pourraient apporter des précisions sur cette question.

« Selon moi, une des priorités sera d’analyser la façon dont ces changements cérébraux se traduisent dans la performance clinique des astronautes » explique-t-elle. « Par exemple, est-ce que leur cognition est affectée ? Ces changements cérébraux peuvent-ils être liés aux changements visuels des voyageurs de l’espace ?

Ces questions, admet-elle, sont « nécessaires pour mieux comprendre ce qui se passe et mieux préparer les astronautes pour leurs missions futures. »

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