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LE NUMÉRO DOMINATION ANIMALE

Je suis le seul écolo pro-gaz de schiste français (et je me sens seul)

Selon ce mec, fouiller les sous-sols français ne provoquerait pas une pollution dramatique des nappes phréatiques :(

Photo : Melchior Ferradou-Tersen

Jean-Alex Foret, 70 ans, est un ancien ingénieur d’une entreprise de forage et membre bénévole de l'Amicale des foreurs et des métiers du pétrole. Il est favorable à l’exploitation du gaz de schiste en France mais se définit comme écologiste et « protecteur de la sylve ».

Aux États-Unis, le gaz de schiste a commencé à être exploité à partir du milieu des années 2000, en particulier au Texas et en Pennsylvanie (où le documentaire Gasland, critiquant son exploitation, a été tourné). Cette ruée vers l'or a entraîné son lot de sympathisants – vantant les 500 000 créations d’emplois aux États-Unis et la baisse spectaculaire du prix du gaz – et ses réfractaires. Ces derniers critiquent la « bulle » gazière et dénoncent l'impact écologique de son exploitation : pollution dramatique des nappes phréatiques et possibles fuites de méthane, gaz à effet de serre. Je l’ai rencontré pour qu’il m’en dise plus sur le fait d’être à la fois écolo et partisan d’une entreprise qui pourrait pourrir à jamais les sols français.

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VICE : Pourquoi êtes-vous parti en croisade pour le gaz de schiste ?
Jean-Alex Foret : Cela date de la sortie du supposé « documentaire » Gasland. Beaucoup de gens ont pris en grippe le gaz de schiste – ou comme les spécialistes l'appellent, l' « hydrocarbure de roches-mères ». Des gens se sont attaqués à l'Amicale des foreurs et des métiers du pétrole. On a même reçu des menaces de mort. C'est à ce moment-là qu'on s'est dit qu'il fallait lutter, grâce à nos connaissances et notre savoir-faire, contre la désinformation. Moi, je suis écologiste, et je dis qu'il vaut mieux brûler du gaz que cette saloperie de charbon ou, encore pire, de sacrifier du bois.

Justement, comment peut-on être écologiste et défenseur de l'utilisation potentiellement catastrophique des gaz de schiste ?
Eh bien, le gaz est la plus propre des énergies thermiques. En tant qu'ingénieur en énergie, je trouve que c'est une aberration de faire de la chaleur avec de l'électricité – tout comme c'est une aberration de brûler du bois dans les maisons pour les chauffer. Alors c'est vrai, ça sent bon, mais il faut 50 ans pour faire un bon bois de chauffage !

Le gaz n'est-il pas encore moins renouvelable ?
Il n'est pas en lui-même renouvelable, mais il y en a plein sous terre. Au départ on pensait que le peak oil [le déclin de la production mondiale d'hydrocarbures] arriverait dans les années 80, puis aux alentours de 2015. Aujourd'hui on découvre plein de gaz et de pétrole dans le pré-salifère, en offshore. C'est une réserve en hydrocarbures égale à tout ce qui a été consommé jusqu'à aujourd'hui !

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Puisqu'il est disponible, il faut selon vous exploiter le gaz de schiste ?
Je ne dis pas ça, non. Je dis – et tous les géologues et ingénieurs disent la même chose – qu'il faut au moins explorer ! C'est une folie de ne pas exploiter le gaz de schiste sans savoir quelle réserve nous avons. La loi française de 2011, qui interdit l'exploitation des gaz de schistes par fracturation hydraulique, est une loi électoraliste. En France, on sait forer correctement et proprement. C'est dans notre pays qu'on a réalisé les forages les plus compliqués !

Vous faites référence au gisement de gaz de Lacq ?
Exactement. À Lacq [ungisement de gaz naturel dont l'exploitation a débuté dans les années 60], le forage était infiniment plus difficile que celui de roches-mères [où est situé le gaz de schiste]. En plus, le gaz de Lacq était constitué de 12 à 15% d'hydrogène sulfuré, un gaz mortel à très faible concentration.

Si on exploitait le gaz de schiste en France, ça se passerait mieux qu'aux Etats-Unis ?
Oui, car la loi du sol n'est pas la même : aux États-Unis, le propriétaire du sol est propriétaire du sous-sol : il peut tout saloper. En France, le code minier confie à l'État la gestion du tréfonds : s'il y avait une exploitation du gaz de schiste, elle serait organisée au niveau national. Mais attention : si le sous-sol est bien confié à l'État, il appartient toujours au peuple. En interdisant l'exploitation comme ils l'ont fait, ils interdisent au peuple de profiter, peut-être, d'un bien qui leur appartient. C'est du terrorisme, de la tyrannie !

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Vous dites aussi que certains des Américains à s'être improvisés foreurs ne sont pas tout à fait compétents.
N'importe qui a le droit de se payer son petit forage aux États-Unis et de le réaliser plus ou moins comme il veut. Parmi eux, il y a des « gougnafiers » – des gens qui veulent faire des bénéfices rapidement, en faisant un peu n'importe quoi. En France, les gens ne font pas ce qu'ils veulent. Il y a des règles strictes. Aux États-Unis, certains laissent échapper du méthane de leur forage : le pire gaz à effet de serre – ce sont des salopards.

Exact. Entre 6 et 12% des productions des forages de gaz de schiste réalisées aux États-unis fuient dans l'atmosphère. C'est énorme, non ?
Oui, c'est beaucoup. Mais toutes les rizières, les deltas boueux, les coins à tourbes ou les permafrosts produisent des quantités en méthane infiniment supérieures à ce que l'homme peut produire.

Vous êtes sûr ? D'après le GIEC, 38% du méthane rejeté dans l'atmosphère provient de l'agriculture irriguée et l'élevage bovin, 33% provient des fuites de l'énergie fossile, 23% des déchets agricoles et ménagers et 6% de l'industrie et la déforestation.
Et les étangs, les tourbières… Le GIEC n'en parle pas ? Ce sont des surfaces phénoménales !

Jérémy Rifkin, essayiste américain et spécialiste en prospective, a écrit que « le gaz de schiste est une ressource du XXe siècle ». Pourquoi s'entêter à développer une ressource si nocive pour l'environnement et ne pas se concentrer sur les énergies renouvelables ?
Il voit le monde par le petit bout de la lorgnette. Nous, les foreurs, on n'est pas contre les renouvelables : si quelqu'un arrive à faire du renouvelable viable économiquement, c'est très bien ! Mais avec le nucléaire, les hydrocarbures est ce qui marche à peu près le mieux. Des règles de physique fondamentales nous apprennent que certaines énergies renouvelablesne peuvent pas marcher.

Lesquelles ?
Le photovoltaïque, par exemple. Il y a des constantes physiques qui font qu'en France, il est possible de fournir de l'électricité seulement 1 000 heures par an. Avec l'éolien, ça passe à 1 900 heures. Ce n'est pas avec de l'intermittent et des rendements si faibles que l'on va pouvoir alimenter les industries ou les gens qui ont constamment besoin d'électricité. Qu'on utilise le renouvelable pour des besoins locaux et intermittents, oui ! Pour chauffer, il n'y a rien de mieux que le gaz – qu'il soit naturel, de pétrole, de méthane ou biochimique : il brûle quatre hydrogènes pour un carbone produit, ça veut dire qu'il est beaucoup moins polluant que le charbon, que le bois ou que la lignite. D'accord, il crée du CO2, mais est-ce que c'est vraiment le gaz de serre le plus important ? On a quelques doutes.

D'après le GIEC encore, 56% des gaz à effets de serre sont du CO2, 32% sont du méthane…
Ils ont oublié de parler de la vapeur d'eau ! C'est l'élément qui a la chaleur latente la plus élevée de tous, c'est à dire le plus pénalisant pour l'effet de serre. De plus, c’est le soleil qui fabrique infiniment plus de vapeur d’eau sur les océans que n’importe quoi d'autre. Et le président du GIEC, qui est un ingénieur ferroviaire et pas du tout un scientifique, vient d'admettre publiquement qu'il s'était trompé en confirmant qu'il n'y a plus de hausse des températures mondiales depuis 17-18 ans.

S'ils ont un temps considéré que les températures stagnaient, il ont admis que la chaleur stockée dans les océans augmentait, que la superficie de la banquise diminuait et que le niveau de la mer montait. Vous semblez dubitatif vis-à-vis de leurs affirmations. Vous pensez qu'il n'y a pas de réchauffement climatique ?
Il y a eu plusieurs réchauffements climatiques dans l'histoire de la Terre. Mais l'homme n'est rien par rapport au soleil et les climatologues savent qu'on est dans une période où le soleil est moins actif et qu'il y a moins de rayonnement. Ainsi, c'est pourquoi la température est actuellement en train de redescendre. En plus, le pôle magnétique est en train de se barrer très vite du pôle nord ; on est peut-être à un moment où les pôles magnétiques vont s'inverser et que les systèmes de répulsion de la haute atmosphère et de la Terre vont changer de sens. Il va peut-être se passer quelque chose, mais j'en sais rien.